« L'impression
à chaque fois de pénétrer chez la baba Yaga des contes de notre
enfance; et ses recettes mystérieuses.. Sauver les peaux, peaux
d'oignon, d'ail, de banane, de clémentine, de citron, saupoudrer
d'ortie, de charbon, de thé vert; de café, de spiruline, mixer,
malaxer, étendre, filmer, nourrir les bactéries. Il ne reste plus
qu'à découvrir le langage des holobiontes, le langage murmuré de
l'autre-soi, le laisser-déborder dans son altérité vivante,
vibrante, effervescente et muante. Accueillir de quoi vivre la
différence en soi, hors soi et son miroir d' ici-bas sous la voûte
bleutée de la zone critique...»
Texte de Catherine Dobler - Founder, Fondation LACCOLADE
« Charlotte
Gautier Van Tour’s residency was a moment of research and creation
devoted to the living, to the way it overflows into us and through
us, folds and unfolds, creating a skin, a membrane. Using symbiotic
cultures of microorganisms and fermentation techniques, the artist
created organic pieces like so many invitations to a peaceful
relationship with the living and the microorganisms that make us. Her
materials, including kombucha, agar-agar, and spirulina, become
partners in the exploration of the metamorphic potentials of the
living. »
Texte de Christopher Yggdre - Curator, Fondation LACCOLADE
« The
artist has produced a garden, overflowing territories that invade our
nostrils and retinas, a geography created by an entire population
that is invisible –
one
of bacteria and micro-organisms. Charlotte
Gautier Van Tour works with living material that spreads, shrinks,
and wrinkles depending on variations in temperature and humidity,
evolving at its own pace and ease. The pieces are created using
agar-agar jelly, spirulina, and kombucha, to which she adds various
made of lemon rind, nettles, charcoal...
Hues
ranging from ochre to green, from bister to indigo, appear like
stigmata. “Les
plis du vivant”
evoke
the gestures that are imprinted on fabric, traces of life, traces of
intimacy, that artists and sculptors have used so extensively that
the study of folds has become an exercise in and of itself, so much
that the fold expressing a movement is separated, erasing the body
and the clothing. The fold thus becomes a “trigger
of the imagination”,
according to Mallarmé.
Charlotte
Gautier Van Tour’s
work invites us to let ourselves be overwhelmed, to be altered, to
abandon the trappings of human arrogance and wander through the
furry foliage of microorganisms captured under the lens of a
microscope - and in the company of “Jack
the Bug”,
a surprise guest who arrived during this residency. What we believed
were parasites are in fact our allies in this fight for life, for the
future
whistleblowers.
Can we learn the well-meaning, silent language of the bacteria in our
bellies that, by hook or by crook, like at the origin of the Earth,
weave life, so fragile, unique, and irreplaceable? That, in each of
us, controls the flora and fauna of our skin? »
Texte de Catherine Dobler - Founder, Fondation LACCOLADE
« Les
travaux de Charlotte Gautier Van Tour explorent cette dynamique
universelle infinie qui nous incorpore, et inscrit notre être au
coeur de l’univers. Dans son atelier, elle interpelle avec beaucoup
de modestie les sciences, celles approuvées par les académies comme
les plus occultes, tout en s’inspirant de concepts philosophiques
orientaux. Elle a longtemps pratiqué le
Butō,
une danse contemporaine japonaise qui relève de l’introspection et
qui aborde le corps comme paysage. Elle s’intéresse aussi à cette
pensée japonaise qui considère que tout ce qui est imparfait,
impermanent, est d’autant plus magnifique parce que cela exprime la
vie et correspond au mouvement organique de toute chose. Des
conceptions qui soulignent combien nous participons à un tout
organique, animé, fait d’accidents et d’imprévus,
traversé par des énergies et en perpétuelle transformation. Les
expérimentations de Charlotte Gautier Van Tour en révèlent sa
force, et nous apprennent sur notre propre corps, sur le rapport aux
autres et sur cette immense chorégraphie céleste à laquelle il est
important de se reconnecter. »
Texte de Valérie Toubas et Danniel Guionnet - Revue Point Contemporain -
hors-série Autours
de l’image,novembre 2018. [Entretien complet PDF]
« (…)
Toutes ces réflexions et réfractions de la lumière engendrent un
espace en expansion où le spectateur se laisse prendre, perd le
sens de la dimension, oublie l’échelle de perception. Tout autour,
le monde environnant donne l’illusion de se produire et de se
révéler dans l’expansion de la lumière.
La
lumière sur laquelle travaille l’artiste est bien plus qu’un
éclairage ou un rayon lumineux, c’est la matière infiniment
subtile dans laquelle baigne le monde, l’éther des physiciens, la
substance même du monde qui nous échappe (...). »
Texte de George Quidet, galerie HCE, 2017
« Si
la dimension spectaculaire de la philosophia naturalis, basée sur
l’observation des phénomènes naturels, a mené celle-ci à sa
perte au XVIIIe siècle au profit d’une pratique scientifique
fondatrice des sciences modernes, sa force de persuasion est toujours
présente de façon plus ou moins marquée dans l’art contemporain.
Grâce
aux clés
de compréhension
fournies par l'évolution des sciences et le développement des
technologies, les artistes contemporains interrogent cette séparation
entre le savant et le merveilleux en appliquant à leur échelle les
lois naturelles qui régissent la matière et les phénomènes
naturels tout en révélant le caractère surprenant de certains
principes mécaniques et scientifiques.
Transformant
leur atelier en de véritables laboratoires, en salles de
« physique » au
sens étymologique du terme en « observation des manifestations
naturelles »,
ils pratiquent l’analyse
de phénomènes
météorologiques,
géologiques ou biologiques en créant et provoquant des micros
cataclysmes, des érosions, des condensations et autres fissurations.
Des phénomènes qui, au-delà de leur caractère scientifique ou
fantastique, leur permettent d’apporter un nouveau regard sur notre
place dans l’univers et, par un jeu de transpositions, sur
les
phénomènes
sociologiques ou anthropologiques. Une
approche bidimensionnelle
faite de rationalisme et d’émerveillement, et s’engageant
parfois sur des territoires scientifiques tels que la mécanique des
masses, la thermodynamique des fluides, la résistance des matériaux,
qui les place incontestablement dans la chaîne
de la recherche.
Les
artistes
contemporains
introduisent ainsi un nouveau rapport à la connaissance tout
en
gardant comme point de départ la base d'une observation
« objective ».
Une
parenté que Charlotte Gautier Van Tour et Marion Flament développent
autour d’un projet d’expositions,
de rencontres et de débats,
mettant en parallèle
des
démarches d’artistes
et de scientifiques avec pour ambition de souligner leurs points de
similitude, tant dans l’agencement
de leurs ateliers/laboratoires respectifs que dans les outillages
et matériaux qu’ils emploient.
Le
premier opus du projet, wanderer
above the sea of fog,
réunit
à
la
Villa Belleville 10
artistes dont la pratique renoue avec cette philosophie naturelle en
ré-interrogeant les phénomènes
par des approches mêlant tout autant science que poésie ou
fantastique. Des travaux qui nous rappellent par certains aspects ce
« réalisme
fantastique »
capable
de nous faire
accéder
aux mystères que contient la réalité. En
effet, si le rapport aux savoirs persiste dans leur démarche, s'ils
conservent certaines propriétés
physiques, ils développent leur champ d'action dans d'autres
contextes. Sensibles aux débordements, aux accidents, à la
surprise, aux aléas
qui,
comme le hasard,
ne sont pas l'indice d'une
méconnaissance,
d'une désorganisation dans l'agencement des savoirs ou d’une
faiblesse du processus de construction, ils expérimentent avec une
forme d’enthousiasme
émerveillé
un nouveau modus operandi, une autre appropriation de ces phénomènes.
Au
rationalisme et aux protocoles
rigides,
ils opposent une ouverture d’esprit
indispensable pour appréhender le
caractère
magique ou poétique de certains phénomènes.
Et si la science s’appuie
sur une forme d’empirisme,
ils n'hésitent pas à revisiter l'ordonnancement des faits, à en
jouer pour y introduire une forme de subjectivité
afin de provoquer l’inconnu. »
Texte de Valérie Toubas et Daniel Guionnet- Revue Point contemporain pour le
texte d’exposition de Wanderer
above a sea of fog à la Villa Belleville, 2017
« Nos
movemos en un rango de percepción limitado. Vivimos rodeados de
sonidos, colores y seres vivos que no somos capaces de percibir.
Existen fuerzas que no comprendemos y que, sin embargo, dejan en
nosotros una impronta real. Lo que ayer era magia hoy podemos pre-
decirlo y manipularlo. No es una transformación exterior, sino una
transmutación de la per- cepción, la conciencia de que el universo
palpita y que la huella de su pulso puede capturarse. En “Ser o
estar”, de Charlotte Gautier y Linda Sánchez, el arte se convierte
en catalizador de esta búsqueda. Ese concepto interior que convierte
la palabra en poesía y la piedra en algo bello se propone aquí como
herramienta para unir “dentro” y “fuera”, “visible” e
“invisible” y juntar los polos que realmente siempre fueron uno. »
Texte d’Álvaro Rodriguez de la Rubia, Casa de Velazquez, Octobre 2015